vendredi 8 octobre 2010

Flics (et journalistes) contre lycéens à saintQuentin


Vendredi 8 octobre
 
[11h33] La police charge les manifestants
 
La police a commencé à charger les manifestants «anti-retraites» qui défilent depuis ce matin dans les rues de Saint-Quentin (Aisne). Le mouvement qui rassemble entre 500 et 600 personnes est parti du Lycée La Ramée. Comme hier la manif des lycéens dégénère. Au moins une personne a été interpellée après la charge de l'UDI (unité départementale d'intervention).
 
Leur presse (L’Union), 8 octobre 2010.
 
 
[10h25]  Plus d'un millier de lycéens dans les rues ce vendredi
 
Les lycéens manifestent de nouveau dans les rues de Saint-Quentin contre la réforme des retraites, ce vendredi.
 
En milieu de matinée, ils étaient 1000 à 2000 selon la police.
 
Après les affrontements survenus jeudi devant le lycée Condorcet, quartier Europe, certains manifestants bloquent l'entrée du lycée Henri-Martin, en centre-ville, provoquant quelques tensions.
 
Leur presse (Le Courrier Picard), 8 octobre.
 
 

[Jeudi 7 octobre] La manifestation dégénère
 
On n'avait pas vu de tels affrontements depuis la visite de Nicolas Sarkozy en 2007. La manifestation lycéenne contre la réforme des retraites a tourné au vinaigre.
 
 
 
Et pourtant, tout avait démarré de manière guillerette et bon enfant. Devant les grilles du lycée Condorcet à 9h30, (quartier Europe), une cinquantaine de jeunes est massée. L'objectif de la Jeunesse communiste : bloquer l'entrée de l'établissement aux élèves. Rien de méchant, juste montrer son mécontentement contre la réforme des retraites.
 
Quand on interroge Loïs, militant communiste, les réponses fusent dans tous les sens : «On refuse l'allongement de la durée de cotisations. L'argent en France n'est pas redistribué correctement. Les classes moyennes subissent.»
 
Et puis, le jeune militant bifurque sur la suppression de postes des enseignants. «En Terminale, on a du mal à terminer les programmes. On va au Bac sans avoir étudié la totalité des programmes.» L'Éducation nationale en prend pour son grade : «On veut plus d'argent pour l'enseignement. L'éducation permet de se développer.»
 
Il prévient : «À 10 heures, c'est là qu'on va vraiment bloquer.» C'est l'heure de la récré à Condorcet. Les lycéens fumeurs sortent de l'établissement. Une voiture de police est stationnée à proximité.
 
Et puis, tout débute par un lancer de tomates sur le véhicule. Les lycéens chambrent. Deux motards viennent en renfort. Cette fois, ils ont droit à des œufs. À croire que certains étaient là pour en découdre. Des jeunes du quartier, qui ne sont pas lycéens, semble-t-il, ont rejoint le mouvement. Ils sont entre 300 et 400.
 
Et, là, le simple blocus devient très tendu. Entre les jets de bouteilles de bière, d'eau, de branches d'arbre et les pétards, le service d'ordre se trouve rapidement débordé. Même les assistantes d'éducation ne savent plus que faire. La dizaine de policiers présents est rapidement rejointe par les hommes de l'unité départementale d'intervention.
 
Tous portent leur tenue anti-émeute : casque, gilet par balles, bouclier. Les projectiles fusent, les organisateurs du mouvement sont débordés. Les policiers répliquent : des grenades lacrymogènes volent dans le ciel. La foule s'écarte. Et puis, la provocation continue. La réplique monte d'un cran : cette fois, les policiers chargent. Une première fois. Il y en aura deux autres.
 
 
 
 
 
 
 
 
Les hommes en bleu franchissent même l'entrée de l'établissement. Le proviseur ne voudra pas nous dire, si oui ou non, il leur a donné l'autorisation.
 
«Dans un sens ou dans l'autre, cela pourrait être source de polémique», dit-il en substance. Il est midi. Des bris de bouteilles jonchent le sol. C'est la fin du premier acte. L'après-midi, avenue Schuman, second acte, les lycéens sont un peu plus de 200 à stopper les véhicules.
 
Certains frappent sur un bus, bloqué. Les pérégrinations se poursuivent à Jean-Bouin, puis à La Ramée où les grilles sont fermées, empêchant les élèves de se greffer au mouvement. La dislocation interviendra en milieu d'après-midi, toujours sous l'œil de policiers aux aguets.
 
 
 
 
Des fauteurs de trouble à la manif
 
Sur les 200 à 300 manifestants, une poignée n'avait cure de la réforme des retraites. Ils ont voulu en découdre et ont payé le prix en finissant au commissariat.
 
Un commissaire sous tension. Des jeunes qui veulent en découdre avec les forces de l'ordre. Cela ne pouvait que mal se terminer. Téléphones portables et réseaux sociaux pour ce rassemblement qui, au départ ne devait être qu'un blocus du lycée Condorcet à Saint-Quentin, ont fonctionné à plein pendant une semaine.
 
À cinq jours du prochain mouvement national contre la réforme des retraites, les jeunes lycéens ont voulu montrer leur désaccord. Les jeunes communistes sont les instigateurs de ce blocus. Un peu brouillon dans leur organisation, ils ont tout de même réussi à rassembler entre 200 et 300 lycéens devant les grilles de l'établissement. Car, ils n'étaient que 50 avant la pause de 10 heures.
 
Jets de projectiles à la récré
 
10 heures, c'est l'heure de la récré à Condorcet. C'est à ce moment que les jeunes sortent pour aller fumer. La tension est montée d'un cran. Les projectiles pleuvent. D'abord des tomates, puis des œufs en guise d'entrée. Le plat de résistance est costaud : on passe ensuite aux jets de bouteilles et aux pétards. Des personnels du lycée sont visés. Le proviseur reçoit un œuf sur la tête. Ils sont débordés tout comme les forces de l'ordre qui appellent aussitôt du renfort.
 
Au loin, trois fourgons de l'unité départementale d'intervention déboulent en trombe. En sortent des hommes casqués, munis de leur tenue anti-émeute et de leur bouclier. Les échauffourées débutent. Pour dissiper les excités, des bombes lacrymogènes sont balancées. La dispersion débute. Pas pour longtemps. Les jeunes se regroupent. Les policiers chargent jusqu'au parking de l'établissement.
 
 
 
 
 
Et maintenant, place au dessert avec les interpellations. Quatre jeunes, repérés, quelques minutes auparavant, sont interpellés aux abords du lycée. Deux ont été placés en garde à vue, les deux autres ont été relâchés peu de temps après.
 
 
 
 
En début d'après-midi, c'est un autre défilé qui démarre du quartier Europe. Les jeunes se dirigent vers le lycée Jean Bouin, puis celui de La Ramée. Cette fois, les slogans sont plus virulents et ne concernent pas les retraites. Les policiers sont aussi plus discrets. Ils ne sont pas intervenus, sauf sur la place de la basilique. Des poubelles ont été renversées devant le lycée La Ramée. Et la vitrine d'un géomètre a été saccagée rue Jules Coupé.
 
 
 
 
 
 
 
Leur presse (Le Courrier Picard), 8 octobre.
 
 
Manifs de lycéens dans l'Aisne : ça dégénère encore
 
Ce matin encore la manifestation des lycéens a dégénéré. Ils étaient plus d'un millier au plus fort du défilé. Cagoules et projectiles ont fleuri dans le cortège. Une jeune fille a été interpellée.
 
Présentée au départ comme un mouvement de protestation contre la réforme des retraites, la manif des lycéens a rapidement dégénéré en quasi-émeute urbaine.
 
«TOI la presse, on va te faire bouffer ton appareil photo. T'as pas encore compris qu'on est là pour tout péter ?» Le visage masqué par une écharpe, capuche sur la tête, le lycéen précise ses menaces : «Si on me reconnaît sur une photo, on va te tuer toi et ta famille.» C'est clair, on est loin de l'ambiance bon enfant qui accompagne, en général, une manifestation lycéenne. Le bilan est, d'ailleurs, aussi lourd que le climat : des dizaines de poubelles renversées, des rétroviseurs cassés, des boîtes aux lettres arrachées, des vitrines brisées, les portes d'un bus forcées…
 
«Sarko, on t'enc…»
 
Rue Robert-Schumann, une femme demande à un petit groupe de descendre du capot de sa voiture. Ils la giflent et s'enfuient. Un peu plus loin, un cabinet d'architectes est littéralement pris d'assaut. L'homme avait osé protester quand on avait renversé ses poubelles et endommagé son automobile. «Ils étaient surexcités, ils ont mis plusieurs coups de pied dans la vitrine et l'ont brisée», raconte l'une des collaboratrices du cabinet.
 
L'un des jeunes tente bien de raisonner ses congénères : «Arrêtez, c'est nul, on est là pour les retraites !» Il a aussitôt droit à quelques claques et autres coups de pied. Quelques minutes plus tard, son agresseur est discrètement interpellé par des policiers en civil.
 
Neuf interpellations
 
Les larmes aux yeux, le visage en sang, il s'assoit et ne peut que contempler le désastre.
 
Si quelques affichettes laissées au départ du cortège témoignaient des motifs officiels de la manif, les slogans se limitent à des «Sarko, on t'enc…», hurlés sur le toit d'une voiture ou d'un bus. Certains agitent des drapeaux algériens ou marocains en guise d'ultime provocation.
 
 
Dès le matin, le malaise était palpable devant les grilles du lycée Condorcet. D'après le blog du PCF, la Jeunesse communiste aurait initié la manif. Leur appel a été relayé sur Internet et sur les portables. «On a été avertis par SMS qu'il fallait bloquer le lycée, raconte une lycéenne. On a alors décidé de ne pas aller en cours et on s'est regroupés devant le bahut. On devait être au moins 300. Ça a dégénéré quand quelques types sont allés chercher des œufs, des tomates et des cannettes pour les lancer sur la police.»
 
Épaulés par les hommes de l'unité départementale d'intervention, les policiers chargent trois fois et procèdent alors à quatre interpellations.
 
Après la pause déjeuner, les jeunes se regroupent à nouveau. Grossi par quelques élèves du lycée Colard-Noël, le cortège se rend au lycée La-Ramée. Ils sont plus de 500 à se diriger ensuite vers le lycée Henri-Martin. Ils n'y trouveront aucun renfort. Ce n'est qu'aux abords de la place de l'Hôtel-de-Ville qu'ils seront bloqués par des policiers, qui s'étaient montrés jusqu'alors étrangement distants. Il est 17 heures, retour au lycée Condorcet, la manif est terminée.
 
Une vingtaine d'agitateurs, bien décidés à en découdre avec les forces de l'ordre, tente de rejoindre le centre-ville à nouveau. Contenus sur le trottoir par les policiers, quatre d'entre eux seront interpellés, en face de la basilique.
 
Hier soir, deux jeunes étaient toujours en garde à vue.
 
Leur presse (L’Union), 8 octobre.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire